Poisse ou malédiction ?

Dimitry remontait le long de la route Eclipse. Il venait de passer une journée de plus mauvaises.

Il s'était taulé dans les escaliers en sortant de son appartement, s'était pris un mur en se faisant héler par quelqu'un, avait glissé dans un trou, manqué de se faire assomer par une bande de marmots qui jouaient au ballon, s'était pris une averse, et comble du malheur, il était arrivé en retard pour rencontrer quelqu'un qui devait lui revendre un artefact qu'il cherchait depuis un moment.

Dépité, il avait décidé de rentrer chez lui pour se recoucher ; après tout, il y a des jours comme ça...

Il marchait d'un air morne lorsque soudain, la lumière disparut de la rue. Il y eut un grand bruit de poubelles qui se fracassent au sol, accompagné de quelques jurons...

* Je vois pas ce qu'il peut m'arriver de pire... *

"Mais quel charme ! Quel élégance !"

minauda une voix derrière lui, Magda s'avançait d'une démarche traînante et narquoise.

"Il faut que je fasse une photo mentale pour la transmettre au petit couple Normon..."

Dimitry était étalé entre deux poubelles renversées, couverts de quelques détritus. Il avait les yeux rouges de fatigue, une barbe de six jours et le teint crayeux.

" Tu n'es pas en train d'enterrer des maccabés, toi ? " grogna t il en se relevant.

"Tu vas bientôt finir par faire partie de mes clients d'ailleurs... Tu es dans un état é-pou-van-ta-ble..."

dit-elle, mais sa voix ne paraissait aucunement émue de ceci.

Elle le regardait de haut avec un air de princesse hautaine.

Dimitry épousseta sa veste d'un air plein de morgue :

" J'ai eu pas mal de boulot ces temps-ci... Pas vraiment le temps de quoi que ce soit... "

* Tu parles... Toutes mes reliques me sont passées sous le nez... *

" Je ne veux pas te donner des leçons, mais en étant aussi... crades... tu ne risques pas de perdre en crédibilité face à tes clients ?"

s'enquit doucement Magda.

Dimitry haussa les épaules :

" Peu importe, si le travail est fait... " répondit il.

"... Et tu en as fait réellement beaucoup ces temps-ci ? Tu as surtout l'air d'un clodo..."

" Tes morts te font une remarque sur la tronche que tu as, toi, poil de courgette ? " répliqua Dimitry, éludant ainsi la question.

(XD)

"Mon biquet, la réponse est dans ta question, ils sont morts, ils n'ont plus les yeux en face des trous mais seulement des trous à la place des yeux..."

répondit Magda.

"Admets plutôt que tu es à la rue, seul et méprisé de tous..."

" Ca ne change pas grand chose pour moi, j'ai toujours été seul et méprisé et je m'en porte à merveille... "

Il mit les mains dans ses poches à la recherche de ses clés mais... à l'évidence, elles avaient disparu...

* Ca continue... je suis maudit *

"Méprisé parce que méprisable, cela n'a rien de glorieux, tu n'as pas d'orgueil, de dignité..."

dit Magda en le regardant fouiner dans ses poches.

" Je n'en tire aucune gloire, je m'en contrefiche un peu... " répondit il en scrutant les poubelles à la recherche de ses clés.

"Je suis un gland et j'aime ça..."

"C'est beau..."

dit-elle d'une voix froide.

Dimitry shoota dans quelques détritus en tournant en rond comme un chat qui court après sa queue.

" Merci... " répondit il sans vraiment avoir fait attention à ce qu'elle disait.

"Tu cherches quelque chose ?"

lui demanda Magda.

" Non, ça m'amuse de fouiller dans les poubelles " répliqua Dimitry.

" Cette journée est définitivement pourrie... " marmonna t il.

"Oh, je pense qu'on peut faire un peu plus pour la rendre... mémorable..."

dit Magda en regardant les poubelles, cherchant du regard ce que Dimitry pouvait bien rechercher.

Dimitry se mit à balancer des détritus, certains volant vers Magda.

" Si tu t'en allais, je pourrai me dire qu'elle n'est pas si mauvaise... "

Magda vit alors un trousseau de clés, et avec une racine qu'elle fit pousser, elle les fit discrétement passer sous terre.

"Tu crois que ça va me motiver à partir ?"

Dimitry se releva et la toisa, l'air mécontent :

" De toute façon, tu vas t'accrocher, pire qu'un bulot à son rocher... quoi que je dise... "

"Ce n'est pas tous les jours que j'ai la joie de te voir dans cet état..."

dit-elle en faisant filer la clé dans quelques tunnels de taupe...

" Je comprends, le malheur d'autrui est tellement beau à regarder... "

" Mais quand les rôles s'inversent, c'est tout de suite moins drôle "

* Où j'ai foutu ces pu*** de clés ! *

"Ton malheur, mon gars, ton malheur..."

dit-elle.

"Tu ne cherches plus ? Tu as trouvé de quoi te faire ton repas du soir ?"

" C'est toi que je vais bouffer si tu me casses encore les pieds... "

Pensant qu'il les avait perdues sur son chemin, il fit demi tour, bousculant Magda au passage, pour revenir sur ses pas.